Enfer

XXVI Dimanche T.O. –

Bien sûr, le thème de l’enfer n’est plus vraiment «  à la mode » et, grâce à Dieu, tout l’anecdotique traditionnel sur ce lieu de «  tourments » ( Lc 15, 32 ), décrit avec des particularités inquiétantes et révélatrices  d’une fantaisie débordante et risquée, a cédé la place à une plus grande austérité d’images avec l’avantage d’une plus profonde sensibilité des enjeux. L’enjeu est assez haut : le risque est de rater sa propre vie en temps et en éternité. Ce sens de l’échec et cette conscience d’avoir gaspillé cette grande occasion est le sentiment qui brûle et consume ce pauvre riche qui, à la fin, nous fait même pitié, combien doit-il alors faire pitié au Seigneur Jésus qui raconte cette parabole. Dans le chapitre précédent de son évangile, Luc nous a mis face à l’abysse de la miséricorde de Dieu qui se comporte comme un berger qui cherche sa brebis perdue, ou comme une femme qui n’a de repos que lorsqu’elle retrouve la drachme perdue, et comme un père qui n’arrête jamais d’agir comme tel. Mais nous voici maintenant confronter à l’autre face de la médaille : nous et notre façon de porter le mystère de la vie en relation à nous-mêmes, aux autres et à Dieu. L’exhortation de l’apôtre nous rappelle l’horizon le plus digne pour chacun d’entre nous : «  Toi, homme de Dieu, fuis tout cela, poursuis, au contraire la justice, la pitié, la foi, la charité, à la patience, la douceur » ( 1 Th 6 , 11 ).

Dans la parabole, il n’est pas dit que le riche était méchant et le pauvre bon : simplement, il y a cette «  porte » ( Lc 16, 20 ) sur la terre qui devient ensuite un «  grand abysse » ( 16, 26 ) au ciel. Le vrai problème du riche est de ne pas avoir vu le pauvre et, au ciel, il demande à être vu, mais par qui – dans ce cas précis Lazare – dont il ne pourrait même pas reconnaître le visage : son visage  est toujours resté blindé à l’intérieur, pendant qu’il faisait « bombance » ( 16, 19 ) . Le message est clair et simple : comment peut-on penser se voir et se rencontrer au ciel si l’on ne s’est jamais rencontrés, ni même croisés sur la terre. Le riche n’est pas un insensible, vu sa préoccupation pour ses bien -aimés «  cinq frères » ( 16, 28 ), mais c’est quelqu’un de superficiel qui a oublié le « septième » de ses frères, qui est justement Lazare. Ainsi, pour se riche, s’applique à merveille la parole du prophète : « Allongés sur leur divan, il mangeaient… chantonnaient… buvaient le vin dans de larges coupes et s’enduisaient d’onguents les plus raffinés, mais ne se préoccupaient pas de la ruine de Joseph » ( Am 6, 4-6 ). C’est comme si l’on n’avait pas le temps de se préoccuper de se qui se passe devant «  la porte », là où l’on pourrait apprendre à être humains même pour les «  chiens » – Lc 16, 21 ). Le riche ne voit rien, n’a d’yeux pour personne sinon pour lui !

Certes : la réaction d’Abraham est forte, même sans pitié, mais c’est une façon de mettre en garde du danger de tomber dans une sorte d’anesthésie spirituelle que l’on utilise chaque fois que nous ne lisons plus notre vie  – dans l’abondance et la pauvreté – surtout et toujours «  face à Dieu qui donne vie à toute chose et à Jésus Christ qui a donné son beau témoignage devant Ponce Pilate «  ( 1 Th 6, 13 ). Le remède à l’anesthésie spirituelle est de «  conserver sans tache et de façon irréprochable le commandement » ( 6, 14 ), en nous ouvrant ainsi à une «  anastasie » déjà maintenant sur terre. Au lieu de rester allongés, ( Am 6, 4 ), nous devons nous lever et traverser cette «  porte » blindée qui risque d’être notre pierre tombale pour l’éternité, en révélant, en réalité, à quel enfer nous nous sommes condamnés nous-mêmes par une très triste négligence.

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