Convertir… la douleur

V Dimanche T.Q. 

Alors que le célébrant conclut la lecture de l’Evangile, il nous est difficile de ne pas ressentir un pincement de coeur en entendant le commentaire de l’évangéliste : ” Il disait cela pour indiquer de quelle mort il devait mourir ” ( Jn 12, 33 ). Le Seigneur Jésus résume pour nous le mystère de son imminente passion par deux symboles, apparemment aux antipodes. Il nous parle d’abord du ” grain de blé tombé en terre ” ( 12, 24 ) et, tout de suite après, avec une surprenante solennité limpide, il dit : ” lorsque je serai relevé de la terre, j’attirerai tous à moi” ( 12, 32 ). Le mystère de Pâques, désormais imminent, crucifie toutes nos fausses attentes et les rectifie. Nous aussi, comme ces ” Grecs” qui sont montés à Jérusalem pour la fête, ” nous voulons voir Jésus ” ( 12, 21 ), mais il n’est pas certain que nous voulons être vus par Lui et conduit ” par la main ” ( Jr 31, 32 ), loin de toutes nos illusions, même des plus dévotes. La Lettre aux Hébreux ne laisse pas de répit à notre fantaisie religieuse et nous met face à la réalité du salut avec un réaliste pur et limpide : ” Il offrit prières et supplication avec  forts cris et larmes ” (He 5, 7 ) et encore  ” il apprit l’obéissance par les choses qu’il subissait ” ( 5, 6 ). La question de la douleur et l’attitude que chacun doit avoir face à ses limites est- pour tous et partout – une question fondamentale, dont dépend la possibilité pour chacun de devenir un homme en vérité et d’être capable de vivre solidairement avec ses frères et soeurs en humanité. L’Occident cherche à se débarrasser de la douleur par la distraction, alors que l’Orient le fait par la pratique de la concentration. Pour l’évangile, la meilleure façon est celle de passer à travers la douleur, sans la minimiser, ni l’exalter : en l’endurant dans le sens de la vivre de fond en comble. Jung – psychanalyste suisse et protestant qui avait une croix dans son  cabinet médical, qu’il regardait souvent pendant qu’il accueillait la douleur de ses patients – disait ceci : ” La douleur doit être surmontée, et peut être surmontée seulement en la prenant en charge “. Alors que nous approchons de la Semaine Sainte, la liturgie nous demande de prendre en charge la douleur comme une réalité à traverser. Elle  nous rappelle  aussi que, pour traverser le  gué de la souffrance nous ne sommes pas seuls, mais que le ” Fils” lui-même nous y a précédés. Le Christ Seigneur, par sa ” patience, ” devient cause de salut pour tous ceux qui lui obéissent ” ( 5, 9 ). Dans l’icône de la Descente aux Enfers, nous contemplons le geste du Christ qui, vainqueur de la mort, relève de l’abîme obscur et insensé du Shéol nos ancêtres, avec sa main puissante. Mais pour être relevés de nos enfers, nous devons accepter de les traverser pour connaître combien est grande la miséricorde qui nous remplit de sa lumière. En effet, selon la parole du prophète, le Seigneur qui nous prit ” par la main ” ( 31, 32 ) nous chuchote aussi à l’oreille de notre coeur ” je pardonnerai leur iniquité et ne me souviendrai plus de leur péché ” ( Jr 31, 34 ). Comme des enfants dociles et heureux, nous pouvons tendre notre main et nous laisser conduire ” par un esprit généreux ” ( Ps 50, 14 ). 

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